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Vie de jeunes filles : l’enterrement du célibat à la mode

Meguetan Infos

Une fois que la date de leur mariage est fixée, les jeunes filles organisent, de plus en plus, de petites fêtes entre amies pour dire adieu à la période de chasteté. Ce phénomène importé des pays développés est prisé par la gent féminine

C’est une pratique moins connue ou presque pas pour la majorité de nos compatriotes. Pourtant, elle a acquis droit de cité dans notre pays depuis quelque temps maintenant. L’enterrement de vie de célibataire est une tradition occidentale qui consiste à profiter des derniers instants de plaisir du célibat, avant de basculer dans le statut de marié ou de la mariée, dont les contraintes sont immenses, notamment en termes de restriction de liberté d’action, de faire des choses seul ou seule mais aussi d’engagement de fidélité et de respect de la différence de l’autre, entre autres.

Dans les grandes métropoles, les garçons aussi bien que les filles enterrent leur vie de célibataire une fois qu’ils décident de s’unir en couple devant l’officier d’état civil pour le meilleur et le pire. C’est un «rituel» qui continue, jusque-là en tout cas, de résister à l’épreuve du temps. Dans notre pays, la jeunesse surtout la gent féminine, qui a découvert ce phénomène d’ailleurs sur les écrans de télévision, en prend, de plus en plus, graine. Certains compatriotes s’accommodent très mal de la pratique qu’ils jugent non conforme aux règles de bonne conduite dans notre société qui incite à avoir le sens de la mesure et à rester soi-même.

Les puritains s’interrogent sur les tenants et les aboutissants de cette mode importée. Ceux-ci n’hésitent même pas à incriminer le phénomène comme une atteinte aux bonnes mœurs. Ils établissent avec un pincement au cœur que l’enterrement de vie de célibataire dans les pays du Nord, c’est-à-dire les pays développés renvoient à des virées nocturnes, à des libertinages sexuels, voire à d’autres folies de jeunesse (alcool à excès et autres) parce que, selon eux, dans ces pays les jeunes se laissent aller à l’excès. La tendance est dominante chez les jeunes filles dans notre pays. L’enterrement de vie de jeune fille (EVJF), selon ses adeptes, n’altère aucunement nos mœurs.

«Notre enterrement de vie de célibataire est très différente de celui des Occidentaux qui se caractérise le plus souvent par une consommation exagérée d’alcool et des danses érotiques qui fouettent la libido», explique Fatoumata Gadjigo, une passionnée de la pratique. En dépit de son jeune âge (19 ans), elle a participé à deux enterrements de vie de jeune de fille et ne conçoit pas faire son hyménée (mariage) sans préalablement savourer «le bonheur de cette pratique». à en croire la bonne dame, elle convolera en justes noces en décembre prochain.

Mais l’idée d’organiser un EVJF en grande pompe lui traverse l’esprit et elle peaufine déjà dans sa tête les derniers détails. L’adolescente précise que l’objectif de cette fête est de dire adieu à la vie de jeune fille et aller vers une nouvelle vie opposée à celle qu’elle a menée jusque-là. Fatoumata avoue que l’enterrement de vie de célibataire est une pratique occidentale qui a influencé les jeunes filles.

Fatoumata Gadjigo explique aussi être une casanière qui passe trop de temps devant la télévision. Elle aime regarder les émissions consacrées sur le mode de vie de grandes stars et c’est au cours d’une émission qu’elle a su l’existence d’une telle pratique. Parlant des décorations de la chambre, elle révèle qu’elles se font en utilisant des mots anglais ou français comme par exemple «bride to be» ou heureux ménage.

“Une séance photos aussi est initiée au cours de laquelle un photographe professionnel fait de belles poses de la bande de copines». Selon Gadjigo, l’organisation de l’EVJF n’est pas une mauvaise chose en soi. «On ne fait pas de bêtises pouvant compromettre la future mariée». Mais, elle a une appréhension diffuse sur l’exploitation qui en sera faite par les prochaines générations.

Les préparatifs de l’EVJF démarrent une fois que la date du mariage est annoncée. Rakiatou Maïga a participé à celui de sa meilleure amie. «On s’est paré de nos plus beaux atours. Nous étions belles comme un cœur», se souvient-elle, avant d’expliquer que la maison qui accueille cette cérémonie d’EVJF est minutieusement choisie.

«La cérémonie se tient dans un endroit chic comme un appartement ou un hôtel. Dans cet endroit, on se lave et s’habille, on se fait sexy. On met la musique et on danse. Il y a même des moments de massage. On fixe l’instant pour la postérité avec des photos et des vidéos uniquement entre filles», relève Rakiatou Maïga.

Au cours de la cérémonie, renchérit la jeune dame, il y a un épisode consacré à la décoration de la chambre, y compris le lit sur lequel la future mariée doit s’allonger et un autre sur lequel on prend des photos. La vedette de la soirée est ensuite maquillée par ses amies, le tout dans un décor paradisiaque, indique celle qui pense que c’est faire un faux procès à une pratique qui ne constitue aucune atteinte à nos valeurs traditionnelles et religieuses.

Chez les Occidentaux, les filles organisent l’enterrement de vie de célibat avec les garçons et cela débouche parfois sur des choses pas catholiques. Mais c’est propre à leur mode de vie. Or chez nous, on le fait parfois en présence de la mère de la nouvelle mariée sous forme d’une petite kermesse, en s’empiffrant de plats succulents. La jeune fille explique que la différence est que la mariée trie sur le volet ses invitées.

Un interlocuteur qui a requis l’anonymat n’apprécie guère la pratique. Il la juge trop onéreuse parce qu’il faut payer de la nourriture et de la boisson. Mais il reconnaît que le phénomène n’est pas l’apanage des seuls nantis. D’autres se démènent pour organiser leur enterrement de vie de célibat dans des conditions difficiles.

Le socio-anthropologue Dramane Satao pense que la pratique résulte de l’interconnexion du monde via médias et réseaux sociaux et d’une méconnaissance de nos valeurs culturelles par les adeptes du phénomène qui tentent de transposer les réalités d’ailleurs dans notre société. Tout cela, estime-t-il, nécessite de vulgariser nos us et coutumes auprès de la jeune génération afin qu’elle s’approprie des valeurs qui nous ont été léguées.

Mohamed DIAWARA

Source: Essor

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