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Dr Drissa Coulibaly, Directeur national des Services Vétérinaires : «Nous n’avons pas d’information sur les cas de Covid chez les animaux au Mali»

Bamako, 4 fév (AMAP) La crainte d’une migration de la Covid-19 des humains aux animaux est de plus en plus redoutée. Le Dr Drissa Coulibaly, Directeur national des Services vétérinaires et délégué du Mali auprès de l’Organisation mondiale de la santé animale, évoque la question et d’autres aspects dans cette interview.

L’Essor : Que savons-nous, à l’heure actuelle, de la cause de la Covid-19 ?

Dr Drissa Coulibaly : La Covid-19 est la maladie causée par le coronavirus (CoV) nommé SARS-CoV-2. Les infections à coronavirus sont fréquentes, à la fois chez les animaux et chez l’homme, et certaines souches de coronavirus sont zoonotiques, c’est-à-dire qu’elles sont transmissibles entre les animaux et l’homme.

En 2019, un nouveau coronavirus a été identifié comme l’agent causal de cas humains de pneumonie. Depuis lors, des cas humains ont été signalés presque dans tous les pays et l’épidémie de Covid-19 a été classée comme pandémie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

L’Essor : Les animaux sont-ils à l’origine de la transmission de la Covid-19 chez les humains ?

Dr Drissa Coulibaly : La pandémie actuelle se poursuit par la transmission d’humain à humain du germe (SARS-CoV-2). Des preuves actuelles semblent indiquer que le SARS-CoV-2, c’est-à-dire la Covid-19 est apparue d’une source animale. Les données du séquençage génétique révèlent que le plus proche virus connu du SARS-CoV-2 est un coronavirus circulant dans des populations de chauves-souris du genre rhinolophus (rhinolophes). Cependant à ce jour, il n’existe pas assez de preuves scientifiques pour identifier la source du SARS-CoV-2, ou pour expliquer la voie de transmission originelle vers les humains qui serait susceptible d’avoir impliqué un hôte intermédiaire.

Des recherches sont en cours pour identifier l’origine du virus et un possible réservoir animal. De récentes découvertes confirment que les infections chez le vison (mammifère vivant en Amérique et Europe) peuvent entraîner à nouveau une transmission chez l’homme.

L’Essor : Les animaux peuvent-ils être infectés par le SARS-CoV-2 ? Quelles espèces animales seraient les plus à risque ?

Dr Drissa Coulibaly : Oui, plusieurs espèces animales ont manifesté une sensibilité au virus après infection expérimentale et en milieu naturel lors de contacts avec des personnes infectées. Il existe également des preuves que des animaux infectés peuvent transmettre le virus à d’autres animaux après contact en milieu naturel, par exemple des transmissions entre visons et de visons à chats.

Cependant, toutes les espèces ne semblent pas être sensibles au SARS-CoV-2. À ce jour, les résultats des études expérimentales d’infection montrent que les volailles et le bétail (bovins, moutons, chèvres, chevaux, ânes, porcs, etc.) ne sont pas sensibles à l’infection. Les animaux, à ce jour, les plus sensibles sont : les chiens, les chats et les visons.

L’Essor : Le risque de transmission aux animaux est-il à craindre au Mali ?

Dr Drissa Coulibaly : Les cas de contamination et/ou d’infection de l’être humain à une espèce animale domestique restent sporadiques et isolés liés à la promiscuité animal-homme, importante en milieu clos et confiné.

Bien vrai que les cas de transmission aux animaux semblent rares, un risque de transmission aux animaux est possible au Mali, dès lors que nous avons des humains malades, si des mesures de protection et d’hygiène ne sont pas pratiquées ou respectées.

L’Essor : Est-ce qu’il y a des cas d’animaux infectés signalés au Mali ?

Dr Drissa Coulibaly : Nous n’avons pas d’information sur les cas animaux au Mali ; aucune publication ou étude n’ayant été portée à notre connaissance. Cependant, dans beaucoup de pays du monde, des cas animaux ont été enregistrés, notamment chez les animaux de compagnie comme les chiens et chats, les animaux d’élevage comme le vison ; les animaux du zoo ou sauvages comme les tigres et les lions.

L’Essor : Quelles peuvent être les conséquences de la transmission du virus de la Covid-19 de l’animal à l’homme ?

Dr Drissa Coulibaly : La principale conséquence est que les animaux sensibles ne constituent, demain, des réservoirs du virus pour les humains, en continuant à perpétuer la maladie au sein de la population. Ce qui pourrait constituer un risque permanent pour la santé publique. Par conséquent, les populations animales sensibles en contact étroit avec l’homme comme les chiens et chats doivent être étroitement surveillées.

L’Essor : Y a-t-il des précautions à prendre pour éviter la transmission du virus de la Covid-19 aux animaux ?

Dr Drissa Coulibaly : Bien qu’il existe une incertitude quant à l’origine du SARS-CoV-2, il convient d’appliquer les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Ainsi, les personnes malades ou suspectes, doivent autant que possible éviter tout contact étroit avec leurs animaux, et faire appel à une autre personne pour s’occuper d’eux. Si elles doivent s’occuper de leurs animaux, elles devraient appliquer les principes de base en matière de bonnes pratiques d’hygiène et les gestes barrières (port du masque, lavage des mains avant et après avoir pris soin de leurs animaux etc.) Les animaux appartenant à des propriétaires infectés par la Covid-19 devraient, autant que possible, rester isolés et éviter les contacts avec d’autres animaux.

Aussi, il convient d’appliquer des mesures d’hygiène générales lors de la visite des marchés vendant des animaux vivants, de la viande crue et/ou des produits d’origine animale. Il faut notamment, se laver les mains, régulièrement, avec du savon et de l’eau potable après avoir touché des animaux ou des produits d’origine animale, ainsi qu’éviter de se toucher les yeux, le nez et la bouche.

Des précautions doivent être prises pour éviter tout contact avec des animaux malades, des produits d’origine animale avariés, d’autres animaux présents sur le marché (tels que chats et chiens errants, rongeurs, oiseaux, chauves-souris) et des déchets ou fluides d’origine animale sur le sol ou les surfaces des installations du marché.

L’Essor : Que peuvent faire les Services vétérinaires nationaux ?

Dr Drissa Coulibaly : Les services vétérinaires doivent travailler étroitement avec les autorités de santé publique ainsi qu’avec celles en charge de la faune sauvage, en utilisant une approche : «Une seule santé» pour partager les informations et coopérer dans leur réponse au Covid-19. Une étroite collaboration entre les autorités de santé animale et publique est impérative pour mieux identifier et réduire l’impact de cette maladie. Dans certains pays, les Services vétérinaires soutiennent les fonctions essentielles de la réponse de santé publique, telles que le dépistage et l’analyse des échantillons de surveillance et de diagnostic prélevés sur l’homme.

Dans ce cadre, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), suite à une requête de la Direction nationale des Services vétérinaires du Mali, va fournir huit lots de kits de détection du virus du Covid-19 chez les humains et les animaux. Trois lots sont déjà arrivés. Le reste est attendu dans les prochains jours.

Il est également important de surveiller les animaux sensibles, tels que les chiens, les chats, les visons, ainsi que les personnes qui sont en contact étroit avec eux, pour détecter une éventuelle infection par le SARS-CoV-2. Une surveillance active est recommandée car il peut être difficile de détecter les infections précoces chez ces animaux, en particulier chez le vison.

Lorsqu’une personne infectée par le virus de la Covid-19 déclare avoir été en contact avec des animaux, une évaluation conjointe des risques doit être effectuée par les services vétérinaires et de santé publique. Il faut signaler depuis janvier 2020, les Services vétérinaires sont membres du Comité technique de coordination pour la lutte contre la maladie.

L’Essor : Quelles sont les responsabilités internationales des Services vétérinaires lors de cas positifs chez les animaux ?

Dr Drissa Coulibaly : L’infection d’animaux par le virus de la Covid-19 remplit les critères de maladie émergente. Ainsi, toute infection ou cas d’infection d’animaux par le SARS-CoV-2 doit être communiquée via le Système mondial d’information sanitaire (WAHIS), conformément au Code sanitaire pour les animaux terrestres de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE).

Les pays sont également encouragés à partager les données de séquençage génétique du SARS-CoV-2 isolés chez des animaux et d’autres résultats au sein de la communauté sanitaire mondiale.

Source: AMAP

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