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Moussa Mara, ancien Premier ministre du Mali, sur la crise socio-politique : « Il est indispensable que le chef de l’État s’engage directement dans les discussions et propose une réponse globale au mouvement du M5 RFP »

Dans un entretien exclusif qu’il nous a accordé, le mardi 14 juillet 2020, Moussa Mara, ancien Premier ministre du Mali et président du parti Yelema, s’est prononcé sur la crise socio politique que traverse le pays qui a abouti, le weekend, à une répression meurtrière. Selon Moussa Mara, la situation est préoccupante « Je crains qu’un palier désastreux ait été franchi avec l’utilisation d’armes meurtrières contre des populations désarmées », a indiqué l’ancien Premier ministre. Il a condamné l’utilisation de ces armes et demander « des enquêtes indépendantes nationales et internationales » afin d’établir les faits. Pour Moussa Mara, tous ceux qui ont été impliqués dans ces tueries, exécutants et donneurs d’ordre, doivent être identifiés et traduits devant la justice. Pour une solution de sortie de crise, de l’avis de l’ancien Premier ministre , « il est indispensable que le chef de l’État s’engage directement dans les discussions et propose une réponse globale au mouvement du M5 RFP.» Lisez l’entretien.

Que pensez-vous de la situation sociopolitique actuelle ?

La situation est préoccupante et je crains qu’un palier désastreux ait été franchi avec l’utilisation d’armes meurtrières contre des populations désarmées. Je condamne avec la dernière rigueur l’utilisation de ces armes et il est indispensable que justice soit faite. Avant les bâtiments publics et les biens, il y a d’abord les vies et aucune vie malienne n’est plus importante qu’une autre. Quel que soit ce qui arrivera, il faut que des enquêtes indépendantes nationales et internationales puissent établir les faits. J’appuie la requête d’amnistie internationale en la matière. Mettons un terme à l’impunité dans notre pays. Que tous ceux qui ont été impliqués dans ces tueries, exécutants et donneurs d’ordre, soient identifiés et traduits devant la justice. Cette perspective d’enquête suivie de procès participera de la stabilisation du pays.

Que pensez-vous de la destruction des édifices publics d’une part, et de la répression meurtrière d’autre part?

Il faut savoir que cette manifestation est la troisième du genre du M5, sa date était connue dix jours avant et le contexte était aussi connu des autorités. La question à se poser est pourquoi des dispositions n’avaient pas été prises pour anticiper les mouvements de foule et les cibles visés ? Ensuite pourquoi des moyens conventionnels anti émeutes n’ont pas été déployés pour encadrer et disperser les foules ? Tout s’est passé comme si on voulait laisser les manifestants saccager les bâtiments publics pour ensuite les accuser de ces travers. Personne ne peut cautionner les destructions de bâtiments publics car ces édifices nous appartiennent mais on doit s’interroger sur le contexte.

Faut-il dialoguer avec tout le monde ?

Je ne vois pas d’autres issues que le dialogue pour sortir de cette crise même si la confiance est très fortement entamée entre les protagonistes. Nous sommes du même pays et chacun souhaite le voir aller de l’avant. Il faut aller vers le dialogue mais aller franchement vers cela, sans faux fuyants et sans demi-mesure. En la matière, la balle est plutôt dans le camp du régime.

Quelle solution de sortie de crise préconisez-vous ?

Il est indispensable que le chef de l’État s’engage directement dans les discussions et propose une réponse globale au mouvement du M5 RFP. Celle-ci doit impérativement comporter la question des nominations à la cour constitutionnelle, le travail de cette nouvelle cour sur les résultats des dernières législatives et la question du Gouvernement incluant celle du Premier ministre. Il faut aborder toutes ces questions ensemble avec des propositions précises. Le M5 doit être associé à chacune de ces étapes et avoir la possibilité de proposer des noms aux différents postes concernés. Le Président dispose en la personne de Dicko d’un potentiel facilitateur des discussions avec le M5. Il y a également le cadre national de médiation ainsi que la CEDEAO qui peuvent tous faciliter. Mais on ne facilite que quand les protagonistes ont une réelle volonté d’avancer et sont disposés à faire des pas concrets.

Quel type de gouvernement préconisez-vous ?

L’idéal serait de disposer d’un Premier ministre de consensus, compétent et en mesure de conduire un vrai gouvernement sur la période 2020 – 2023. Ce Gouvernement dispose d’un fond programmatique avec les conclusions du Dialogue national et les derniers impératifs parus comme la conduite d’enquêtes sur ce qui s’est passé les 10 et 11 juillet. Il reste à en fixer le cadre et déterminer les animateurs. L’idéal serait également d’avoir un Gouvernement resserré (entre 20 et 25 membres) composés de patriotes choisis sur la base principale de leurs compétences et de leur honnêteté. Avec le soutien du camp IBK et du camp M5 RFP. Cela donnerait de la stabilité et créerait les conditions de son succès.

Propos recueillis par B. Daou

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