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Le prochain objectif de Poutine après Marioupol? “Il voudra probablement faire du 9 mai une date-clé”

Meguetan Infos

Si des milliers d’Ukrainiens ont refusé de déposer les armes, retranchés dans une aciérie de Marioupol, la ville portuaire semble entre-temps totalement aux mains des Russes, comme l’entendait Moscou. Mais quelle sera la prochaine étape du plan de Poutine? Selon le lieutenant-général Claude Van de Voorde, tout dépendra de la résistance ukrainienne: “Et nous avons vu de quoi ils sont capables”.

La perte de Marioupol est un gros coup dur pour l’Ukraine. Et sans doute pas le dernier: Vladimir Poutine a bien l’intention de s’arroger de plus en plus de villes de la région du Donbass, à l’est du pays. C’est en tout cas la stratégie présumée que devine aussi le lieutenant-général belge Van de Voorde: “Le sud-est de l’Ukraine commence vraiment à être mis sous pression. Les Russes vont pouvoir établir des liaisons entre les différentes régions acquises, comme entre les villes du Donetsk et du Lougansk. Ce réseau est une manière d’obtenir une forte mainmise russe”. L’armée russe a par ailleurs affirmé mardi matin avoir déjà pris la ville de Kreminna, dans le nord de la région, et les attaques sur Kharkiv ne font que s’intensifier.

Tout pour le 9 mai?

La question que tout le monde se pose désormais, à défaut de savoir où Poutine décidera de s’arrêter, c’est quelle est la prochaine étape de son plan. Divers experts sont désormais persuadés que l’armée russe va lentement se mouvoir depuis le Donbass vers l’ouest, en empruntant la côte. De cette manière, les Russes obtiendront une liaison directe depuis la Crimée qu’ils ont déjà annexée, et coupent totalement l’Ukraine de son accès à la mer. La suite n’est que prédictions, admet Van de Voorde. “Nous ne connaissons pas le dessein ultime de Poutine, nous ne pouvons toujours pas deviner le fond de sa pensée. Rien que pour le bilan humain, j’espère qu’il va annoncer que ses objectifs militaires sont remplis avec l’acquisition du Donbass. Après cela, il pourrait envisager la suite de manière diplomatique uniquement”, espère le gradé belge.

Il pense d’ailleurs que le 9 mai figure sur les plans russes comme un tournant de l’invasion de l’Ukraine. “C’est une date symbolique récurrente en Russie”, explique-t-il. “Le 9 mai est en quelque sorte pour les Russes notre 8 mai à nous, avec la victoire lors la Guerre mondiale. C’est un jour ponctué de parades militaires symboliques. Poutine voudra sans doute faire une annonce ce jour-là. Peut-être voudra-t-il même faire un parallèle entre l’Histoire et la prise du Donbass, en la présentant comme une victoire sur ceux qu’il appelle toujours les ‘nazis d’Ukraine’”. Quant à savoir si cela sera vraiment la fin du conflit armé, le lieutenant-général en doute.

NOUS AVONS VU DE QUOI LES UKRAINIENS ÉTAIENT CAPABLES. PLUS POUTINE SE HEURTE À LEUR RÉSISTANCE, PLUS VITE IL COMPRENDRA QU’IL EST TEMPS D’ARRÊTER
CLAUDE VAN DE VOORDE

Citoyens en armes

Bien sûr, le risque – évoqué par beaucoup – que Poutine ne voudra pas rester sur sa faim, demeure. De nouvelles attaques sont envisagées par de nombreux experts. Mais selon le lieutenant-général Van De Voorde, l’évolution de la situation dépendra beaucoup des ressources souvent étonnantes des Ukrainiens, à commencer dans la région du Donbass. “Les Russes vont vraiment devoir réunir toutes leurs forces pour y garder le contrôle. Car je vois déjà le scénario futur: de nombreux partisans de l’ancienne Ukraine resteront sur place, et nourriront une vive rancœur envers les Russes. Or les citoyens ukrainiens ont été armés par leur gouvernement, et ces armes ne vont pas disparaître du jour au lendemain. De plus, il n’est pas évident pour la Russie de maintenir l’occupation comme actuellement: il faut beaucoup de carburant, de nourriture et de munitions. Dans les villes du Donetsk et du Lougansk, la situation est tout autre: il n’y a quasi plus que des sympathisants pro-Russes sur place, les autres ont fui”.

Les Ukrainiens vont absolument également devoir montrer toute leur force de résistance lors de cette nouvelle offensive russe. L’obstination extrême de la population à Marioupol en aura été un bon exemple. “Nous avons vu de quoi les Ukrainiens sont vraiment capables pour se défendre. Et plus Poutine se heurtera à leur résistance, plus vite il réalisera qu’il vaut mieux s’arrêter là, et qu’il est grand temps de le faire. Ses pertes seraient trop lourdes. Sans cette résilience et cette combativité, l’offensive serait du gâteau pour la Russie, et Poutine se mettrait seulement davantage en tête de tirer toujours plus vers l’ouest”. Et le président russe a les troupes nécessaires pour le faire, précise le lieutenant-général. Mais se regrouper et préparer de nouvelles offensives prend du temps. Et de l’argent. “Et puis, plus il voudra s’étendre vers l’ouest, plus il se frottera à une population qui refuse catégoriquement de plier. Vouloir occuper ces régions occidentales serait un piège pour lui”.

Armes venues de l’Occident

Et, argument de poids, l’Ukraine se voit également appuyée par l’Occident dans son indéfectible résistance. Les Pays-Bas, le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada ont d’ores et déjà annoncé envoyer davantage d’armes, et de plus lourdes, à l’Ukraine pour l’aider à combattre l’envahisseur. Une décision qui tranche avec la prudence initiale des nations occidentales tout au début de l’invasion russe. Pour Van de Voorde, ces nouvelles livraisons sont une bonne chose: “Mais tant que cela se fait de manière discrète, sans trop d’escalade. C’est une bonne chose que l’Otan ait décidé de laisser le libre arbitre à ses membres de manière individuelle. La demande était là depuis longtemps, mais cette fois, l’Ukraine a réellement besoin de ce soutien matériel pour tenir debout. Surtout si la Russie sort l’artillerie lourde. Témoigner sa solidarité, ça ne se fait pas seulement avec des mots”, lance le chef militaire belge.

Mais la Russie supportera-t-elle cet appui militaire détourné? “Bien sûr qu’ils préfèreraient qu’il n’y ait pas de livraisons à l’Ukraine, mais que peuvent-ils bien y faire? Diriger leurs missiles vers l’Occident? Je pense qu’ils savent pertinemment que ça serait du suicide. Je ne pense pas que la Russie cherche réellement une confrontation frontale avec l’Occident”, rassure Claude Van de Voorde.

Par https://www.7sur7.be/

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