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Migrants: la solidarité, cible des autorités

Arrivée de migrants à Lesbos, en Grèce. REUTERS/Alkis Konstantinidis
Texte par :
RFI
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En Europe, on peut risquer des poursuites judiciaires en aidant des migrants. C’est ce que souligne le dernier rapport de l’ONG de défense des droits de l’homme, Amnesty International qui s’est intéressé à 8 pays européens dont la France.

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Le rapport d’Amnesty International souligne qu’au sein de l’Union européenne, chaque pays membre a sa propre lecture d’une politique qui devrait pourtant s’appliquer à tous. Et c’est ce qui se passe en ce moment en Grèce où plusieurs milliers de personnes se sont ruées depuis l’ouverture des frontières turques. « Le mot magique de sécurité et d’antiterrorisme permet souvent de violer les droits humains, on l’a vu dans plusieurs États. C’est, malheureusement, une illustration parfaite de ce dont on est en train de parler », explique Rym Khadhraoui, chercheuse Europe pour Amnesty International.

Les annonces du Premier ministre grec, de suspendre les demandes d’asile pendant un mois « sont en totale contradiction avec le droit international. Le droit d’asile n’est pas dérogeable. On doit assurer ,en Europe, l’accès à ces personnes en droit d’asile, estime Rym Khadhraoui. En plus, en Grèce, il y a une loi depuis février 2020, qui permet à l’État de demander l’enregistrement des ONG sur son territoire, afin de contrôler tout simplement ces actions. Et là encore, dans ce contexte particulier, où des milliers de personnes vont arriver de Turquie, des personnes en détresse, on peut penser que les autorités grecques vont être d’autant plus sévères avec les ONG sur place. Donc, encore une fois, contrairement à ce qu’a dit le président français, ce n’est pas la frontière qu’il faut protéger, mais bien les personnes et les exilés qui sont aujourd’hui coincés entre deux pays qui les rejettent ».

►À lire aussi : Turquie: des milliers de migrants à la frontière avec la Grèce

En France, le délit de solidarité n’existe pas en tant que tel, mais jusqu’en août 2018, toute aide à une personne en situation irrégulière pouvait faire l’objet de poursuite. Depuis, cette loi a été assouplie. Le principe de fraternité est reconnu, mais à condition que l’aide soit apportée dans un but « exclusivement humanitaire ». Et c’est là que s’engouffre parfois la justice. Lola Schulmann est chargée de plaidoyer à Amnesty International : « Ce terme exclusivement humanitaire amène de nombreuses interprétations, puisqu’on part du principe que des personnes agiraient pour d’autres motifs. Et donc, dans ces cas-là, est introduite la question du caractère militant d’une action et c’est dans ce cadre-là que plusieurs personnes ont pu être poursuivies ».

C’est le cas de Pierre-Alain Mannoni. Il y a 4 ans, à la frontière italienne, ce Français fait monter dans sa voiture, trois Érythréennes en détresse, qui avaient marché une quinzaine d’heures en montagne. Il a rendez-vous le 18 mars devant la cour d’appel de Lyon : « Je ne suis pas un passeur, il n’y a eu aucune contrepartie. En plus, dans mon cas, à l’époque, j’étais vraiment « le pékin moyen » qui n’était pas du tout engagé dans aucune action. Ça, c’est vraiment un procès politique pour intimider la solidarité ». Ces poursuites judiciaires ne devraient pas aboutir, mais elles auront fait de cet ingénieur un militant acharné contre une pratique qu’il estime, comme Amnesty International, injuste et abusive.

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