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Attaque d’Inates: les Nigériens entre tristesse, questionnement et colère

C’est un véritable coup de massue qu’ont reçue les Nigériens en apprenant la mort des 71 soldats à Inates. Les Nigériens sont très remontés : beaucoup s’interrogent sur ce qui s’est produit et comment cela a pu arriver.

En s’inclinant devant la mémoire des soldats tombés à Inates au sortir de la réunion du Conseil national de sécurité, Mahamadou Issoufou écrit : « la plus belle des morts est la mort pour sa patrie, les armes à la main. »

Des propos salués par Yves Ali : « Ce sont aujourd’hui des héros que nous pleurons. Nos vaillants soldats sont morts pour une cause, pour la défense de la patrie. Ils sont allés jusqu’à faire le sacrifice suprême. »

Mais trop c’est trop pour El Hajj Idi, un militant de la société civile : « C’est une barbarie sans précédent dans notre pays. Cette fois-ci, c’en est trop. On a mis beaucoup de choses dans la défense, et nous n’avons que la mort et la désolation. »

Ce qui frustre le journaliste Amadou Garé, c’est la facilité avec laquelle les journalistes ont eu l’initiative du terrain. « Il est inconcevable pour un citoyen nigérien de comprendre que des colonnes puissent franchir des centaines de kilomètres, venir attaquer et repartir sain et sauf. C’est ça je pense l’objet de la frustration de l’ensemble des citoyens. »

Demande de comptes et de réponses
À Niamey, la coalition d’opposition Front patriotique a publié un communiqué dans lequel elle recommande au président de la République d’adopter une nouvelle approche plus offensive face à la crise sécuritaire. « Pour nous, il faut se mobiliser autour des forces de défense et de sécurité. Mais en même temps, le président de la République qui est le chef suprême des armées de par la Constitution doit rendre compte de la situation telle qu’elle se présente aujourd’hui devant les Nigériens. Il faut que l’on prenne la question sécuritaire en main ; il faut que les chefs politiques soient proches des hommes et de ce qui se passe sur le terrain et qu’ils soient concentrés sur ces questions-là. Aujourd’hui, l’ensemble des responsables au gouvernement qui s’occupent de la question de la sécurité, je ne crois pas qu’ils aient vraiment l’esprit concentré sur cette question », regrette le président du Front patriotique, l’ancien ministre Ibrahim Yacouba.
« Deuxièmement, il faut une vraie politique de défense. Nous connaissons nos adversaires ; nous connaissons nos ennemis. C’est à nous d’aller leur infliger des pertes qui ne peuvent pas leur permettre de nous attaquer continuellement. Une politique de la défense doit être basée sur l’offensive, pas continuellement sur la défensive. »

Abdoulaye Sounaye est anthropologue, spécialiste des mouvements salafistes au Niger, chercheur affilié au Laboratoire d’études sur les dynamiques sociales (Lasdel) de Niamey. À ses yeux, l’attaque d’Inates soulève une multitude de questions. « On ne peut pas dire que cette région-là n’est pas surveillée par l’armée nigérienne et par ses partenaires. Comment est-ce que des colonnes peuvent se déplacer sans qu’on ne les voie. Ce sont des questions militaires, mais aussi politiques. Pourquoi cette attaque à ce moment précis, à quelques jours de la rencontre de Pau ? Pourquoi Inates ? Toutes ces questions-là méritent d’être posées et auxquelles beaucoup de Nigériens et aussi beaucoup de ressortissants de la sous-région attendent qu’on réponde. Du côté du Niger, une partie de la société civile demande des comptes au gouvernement, du point de vue de sa stratégie militaire. D’autant plus que c’est la deuxième fois. L’armée devrait être plus ou moins préparée. »

L’analyste Jérôme Pigné, du Réseau de réflexion stratégique sur la sécurité au Sahel, regrette que « les opérations militaires menées depuis (l’opération Serval en) 2013 n’aient jamais vraiment été accompagnées d’un projet politique et de développement en phase avec les besoins des populations ». C’est sur ce terreau que les groupes armés terroristes ont réussi à se regrouper et à recruter massivement parmi les populations de la sous région, selon lui.

« La sous-région est restée dans des dynamiques très fragiles en matière de développement économique en terme d’éducation, en terme de santé, et donc cela veut dire qu’il y a un terreau relativement fertile, qu’il soit lié à des idéologies ou à des réalités beaucoup plus concrètes et court-termistes de la part des populations […] La problématique dépasse très largement le carcan sécuritaire et militaire. Et là c’est un échec de gouvernance, c’est un échec politique de la part des États, mais aussi de la communauté internationale qui a parfois proposé certainement des projets de coopération qui n’étaient pas en phase avec les réalités et les besoins des populations »

Source: RFI

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