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Fête de Tabaski, rareté et cherté du mouton sur les marchés : L’insécurité est passée par là !

À quelques jours de la fête de Tabaski, les moutons sont encore rares dans les marchés. Les prix sont aussi intouchables. Marchands de moutons,  clients, transporteurs, tous se plaignent. Le  mal est connu, il s’appelle insécurité. Pour nous imprégner des réalités dans les  marchés, nous avons fait un tour dans les « Garbales » de Faladiè et de Sabalibougou. L’affluence est peu. Les clients crient à la cherté qui est justifiée, par les marchands, par l’insécurité et la rareté du bétail dans la région de Mopti.

Beaucoup de familles risquent de ne pas pouvoir se procurer du mouton lors de la fête de Tabaski de cette année. Contrairement aux autres années, les marchés de bétail ne sont pas abondés cette année. Les moutons qui s’y trouvent ne sont pas à la portée de tout le monde, ils sont trop chers. La cause de tous ces maux, c’est l’insécurité que connait le centre du Mali d’où vient la majorité des marchands de moutons. Des chefs de famille s’inquiètent et  se plaignent de la cherté du mouton. « Les moutons sont trop chers cette année. Nous, les pauvres, risquons de fêter sans pouvoir nous en procurer », s’inquiète Hamidou Guindo, chef de famille, habitant à Baco-djicoroni. Un autre chef de famille, chauffeur de Taxi, Mamadou Togo  assis les deux posés sur les joues perd tout espoir et accuse « ceux qui ont imposé » la guerre au centre du Mali. « Nous n’avons jamais connu cette difficulté. On nous a imposés la guerre dans le pays dogon où la plupart des commerçants allaient acheter des moutons pour revenir nous les vendre moins cher », laisse-t-il entendre. Pour ce taximan, mari de deux femmes et père de neuf (9) enfants, la rareté du mouton et la cherté de son prix dans les marchés sont les conséquences du conflit au centre du Mali.

Nouhoum Traoré, un enseignant a déjà vu venir cette difficulté et  a pris des mesures. « Moi j’ai acheté mon mouton il y a des mois, car je savais qu’avec  l’insécurité que connait la région de Mopti, le mouton allait être rare sur les marchés », nous a-t-il confié.

La rareté du bétail dans la région de Mopti, due à l’insécurité, les attaques des cars, sont, entre autres, ce que déplorent des commerçants que nous avons rencontrés dans les marchés de Faladiè et Sabalibougou.

« Je suis dans le commerce du mouton il  y a plus de 20 ans, mais je n’ai jamais rencontré de difficulté comme cette année », déplore Albouri Tessougé, un marchand ressortissant de  Dimbal dans le cercle de Bankass. Pour sa part, la cherté et la rareté du mouton dans les marchés sont dues à l’insécurité. Ils font, selon lui, objets d’attaques en cours de route. « La semaine dernière, en partant à Niena, un village, pour acheter des moutons, notre car  a été attaqué », a-t-il laissé entendre avant de faire le bilan : «  On m’a dépossédé de tout mon argent, 650.000 f. Je n’étais pas le seul. Beaucoup ont perdu des millions lors de cette attaque ». Une autre difficulté des marchands, c’est qu’il n’est plus possible, pour eux, d’aller acheter les moutons dans les villages reculés des cercles de Bankass, Bandiagara et Koro. « On ne peut, non seulement pas aller acheter des moutons avec la moto, mais nous sommes  aussi exposés à l’enlèvement, même dans les pâturages », explique-t-il.

Un Bankassois, installé à Bamako à cause l’insécurité, Mamadou Kamia, n’a connu que le commerce du mouton depuis le bas âge. Les villages reculés où il achetait les moutons pour venir à Bamako sont devenus des zones rouges. Il a été obligé de changer de localité d’achat. Au lieu de Bankass, il achète maintenant à Fatoma près de Sevaré.  « Les moutons sont moins chers à Bankass, mais nous ne pouvons pas y  aller à cause de l’insécurité », déplore-t-il. À Fatoma où nous faisons l’achat actuellement, précise-t-il, les conditions sont moins favorables qu’à Bankass. Pour lui, toutes les difficultés auxquelles ils sont  confrontés sont dues à l’insécurité. « S’il y a la paix et que les déplacés retournent chez eux  à Bankass, Koro,  Bandiagara, les prix des moutons vont diminuer », laisse-t-il entendre. M. Kamia reconnait la cherté du prix de mouton. Pour lui, le prix minimal d’un mouton est 60000 francs. Comme son prédécesseur, il déplore l’attaque contre les marchands de bétail. « Les hommes armés attaquent et dépossèdent les commerçants de leur argent. L’insécurité nous a posé beaucoup de problèmes. Nous avons très soufferts. La cherté n’est pas notre souhait, elle nous a été imposées par l’insécurité », nous a-t-il confié.

Bouacar Koukoué est un vendeur de moutons depuis 2013 et ses moutons viennent de   Koro, sa propre localité.  Mais, regrette-t-il, il n’est plus possible de partir au-delà de quarante kilomètres de la ville de Koro pour chercher du bétail.  Selon lui, avant la crise,  les marchands partaient chercher, eux-mêmes,   le bétail à des centaines de kilomètres. « L’insécurité a fait que les prix ont augmenté à tous les niveaux », nous informe-t-il avant d’ajouter : « Des moutons qu’on pouvait trouver à 60.000f avant, il te faut 75.000f pour les avoir maintenant ;  il te faut aussi au moins 115000 francs pour les moutons qu’on pouvait avoir à 100000 francs », dit-il. Le transport a aussi, selon lui, augmenté. « Le transport d’un mouton de Koro à Bamako était fixé à 2000 francs, mais il faut 4000 aujourd’hui pour le transport d’un seul mouton », justifie-t-il la cherté des moutons.

Les commerçants de  bétail se plaignent aussi du comportement des policiers et gendarmes au niveau des différents postes. Selon Mahady Sylla, marchand de moutons à  Sabalibougou, ils sont gênés par les policiers, les gendarmes et les douaniers de la route. « Les policiers et les gendarmes font de l’extorsion sur la route. Selon lui, s’ils payaient avant,  1000 F à chaque poste de police, 2000 F aux postes de la gendarmerie  et des douanes, actuellement, les policiers exigent 3000 F par poste, 2000 F pour les gendarmes et 1000 f pour les  vétérinaires. « Ce sont les policiers de Sevaré, de San, et de Ségou qui dérangent plus les marchands transporteurs de bétails. Ils font comme si nous venons d’un autre pays. Mais ils ne donnent aucune quittance pour les paiements », révèle Mahamady Sylla.

Boureima Guindo

Source : Le Pays

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