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À San, l’âge d’or du N’ko

Le N’ko, écriture créée par le guinéen Solomana Kanté, suscite un réel engouement à San, nous apprend le blogueur Cissoko Cheick Oumar

Nous somme à Médine, dans la ville de San (Ségou). Dans ce quartier se trouve la salle de classe du célèbre formateur en N’ko, Adama Coulibaly, dit « Adama Boutikini ». C’est une petite salle construite en hangar de tôle, qui abrite quelques dizaines d’apprenants.

Il est 18 heures. Les élèves arrivent en petits groupes discontinus. Une demi-heure plus tard, les cours commencent. Le formateur se met à dessiner des grosses lettres de N’ko au tableau, qu’il a divisé en deux parties. La première étant réservée aux apprenants de niveau avancé, qui, en attendant, révisent les leçons précédentes. Il procède ensuite à la prononciation, à haute voix, des lettres et invite les débutants à répéter en chœur. Il s’adresse par la suite aux apprenants de niveau avancé en les soumettant à un contrôle sur la lecture d’un texte.

Un bon pédagogue
J’y ai fait un tour et je pense qu’Adama est un bon pédagogue. A travers ses séances de cours, j’ai tout de suite compris que l’alphabet N’ko compte 27 lettres dont 19 consonnes (siralanw), 7 voyelles (siratanw) ainsi qu’une lettre neutre qu’on appelle (tchèdo). Le cours d’Adama est très bien animé et tous les apprenants y participent.

« L’apprentissage du N’’ko est plus qu’un passe-temps pour moi, c’est de l’assimilation même des valeurs culturelles propres à la civilisation mandingue », lance l’apprenant, visiblement fier.

Concurrence linguistique
En effet, le N’ko, écriture créée par Solomana Kanté en 1949, est considéré par beaucoup de spécialistes des sciences linguistiques comme une véritable invention pouvant transcrire les langues africaines, particulièrement le Mandenkan (Malinké), qui n’avait pas d’écriture propre à lui auparavant.

Ici, à San, le N’ko a tendance à dominer l’Arabe dans les milieux intellectuels et spécialistes de la théologie islamique. De fait, nombreux sont des imams et talibés qui possèdent un Coran parfaitement traduit en Mandenkan et transcrit en N’ko. La preuve en est que, pendant le mois de Ramadan dernier, le Coran était lu en Mandenkan, transcrit donc en N’ko et interprété explicitement dans le dialecte local (Bambara du Mali ) dans beaucoup de mosquées. On l’entendait tout le temps sur les ondes de la radio islamique de San.

« Le N’ko est une fierté pour tout citoyen parlant le Mandenkan, car il est reconnu internationalement et enseigné dans des grandes universités occidentales », déclare M. Fofana, propriétaire d’une librairie N’ko et formateur.

Révolution du N’ko
En milieu intellectuel et francophone « sanois », le N’ko est considéré comme un atout, et il pourrait, dans le futur, rivaliser avec le français et l’anglais. Certains parlent d’une révolution linguistico-culturelle à prendre au sérieux.

C’est le cas de Fademba keita, diplômé en science de l’éducation et professeur de français à Tineni, une commune voisine située à 6 km de San ville : « La connaissance du N’ko, en plus de celle du français, fera de nous de bons citoyens et des conservateurs potentiels des valeurs de la société mandingue ».

Ainsi, à San, le N’ko est devenu un véritable outil de communication. On peut le voir un peu partout dans la ville : sur les infographies des banderoles, les plaques des magasins et même sur des t-shirts et pagnes.

Education informelle
Mais, cet enseignement, bien que devenu populaire, reste quand même dans le domaine de l’éducation informelle comme dans plusieurs contrées du pays. Parfois, des cours sont organisés au sein des clubs de jeunes. Il s’apprend aussi sous des hangars en tôle ou en paille et, même souvent, dans les écoles aux heures creuses (week-end, soirs…) ainsi que devant les magasins de commerce.

La plupart des formateurs sont des maîtres d’arabe, des enseignants du système classique et des imams ou des prêcheurs. Ils sont, en général, des enseignants de formation. Les cours se passent même sur des réseaux sociaux, notamment WhatsApp par le biais des groupes créés autour d’un ou quelques formateurs. La formation sur les réseaux sociaux est gratuite. Certaines médersas ont tendance à l’intégrer dans leurs programmes.

Source: benbere

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