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Menaces mondiales : Quels sont les 10 plus grands risques pour 2023 ?

Meguetan Infos

Nous avons identifié les principaux risques mondiaux pour 2023 tant sur le plan américain que sur le plan mondial.

En nous appuyant sur nos nombreuses années d’expérience dans la prévision des risques et des tendances mondiales au National Intelligence Council de l’US Intelligence Community, où nous étions chargés de fournir aux dirigeants américains des analyses et des perspectives à long terme, nous avons identifié les principaux risques mondiaux de 2023 d’un point de vue américain et mondial. Notre bilan est plutôt bon si l’on se base sur les risques que nous avions identifiés pour 2022. Les variantes de la COVID ont effectivement été une source d’inquiétude, notamment en Chine, freinant la croissance économique chinoise, comme nous l’avions également prédit.

Nous avions prévu une invasion russe de l’Ukraine et des prix du pétrole atteignant 100 dollars le baril, ce qui s’est produit plus tôt cette année, bien que les prix de l’énergie aient quelque peu baissé au cours du second semestre 2022. Les pénuries alimentaires, les crises économiques et les problèmes croissants d’endettement des pays en voie de développement ont tous été soulignés l’année dernière, comme ils le sont cette année. Certains économistes prévoient que la crise de la dette ne sera peut-être pas aussi étendue que nous et d’autres l’avons prévu, mais les pays à revenu faible ou intermédiaire, comme le Sri Lanka et le Pakistan, sont déjà confrontés à cette réalité.

La prédiction de l’année dernière concernant l’insuffisance de la lutte contre le changement climatique s’est confirmée lors de la piètre conclusion de la COP27 au Caire, en Égypte, en novembre ; nous estimons que cette tendance se poursuivra en 2023. Enfin, en raison des tensions croissantes autour de Taïwan, mais aussi de l’embargo américain imposé en matière de conceptions et d’équipements dans le domaine des semi-conducteurs de pointe, les divergences sino-américaines persisteront en 2023.

À chaque risque nous avons attribué une probabilité. Une probabilité moyenne signifie qu’il y a une chance sur deux que le risque se concrétise comme prévu cette année. Il est devenu plus difficile de faire de telles projections car un grand nombre de risques sont imbriqués. On utilise le terme de polycrise pour décrire la nature interdépendante des crises. Bien que les polycrises aient existé auparavant, la guerre en Ukraine a mis en évidence l’ensemble actuel de crises interpénétrées auxquelles le monde est confronté. La crise alimentaire a été exacerbée par l’incapacité de l’Ukraine à exporter ses céréales jusqu’à récemment.

La crise énergétique trouve son origine dans les efforts déployés par l’Occident pour priver la machine de guerre russe de ses bénéfices énergétiques et dans les représailles de Vladimir Poutine qui a coupé les approvisionnements en gaz de l’Europe. L’inflation a été dopée par la hausse des prix de l’énergie et des denrées alimentaires, mais elle est également liée aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement résultant de la pandémie. Tout comme pour la dette, l’inflation est également liée à la hausse des prix des matières premières en raison de la guerre en Ukraine, ainsi qu’à la vigueur du dollar et aux dépenses publiques des États pour combattre le ralentissement économique dû à la pandémie.

Le fait que la plupart des risques soient liés signifie que le fait de diminuer la probabilité d’un seul d’entre eux dépendra de la diminution simultanée de nombreux autres risques. De même, la gravité d’un seul de ces risques est liée aux autres et les exacerbe souvent. Néanmoins, nous pensons qu’il est utile de se pencher sur chaque risque individuellement, en gardant à l’esprit la nature interdépendante de tous, et de prévoir la direction vers laquelle chacun évoluera en termes de probabilité – plus élevée ou plus faible – même si un risque individuel ne peut pas diminuer complètement tant que les autres n’ont pas été éliminés.
Les risques
1) Polycrise due à la guerre en Ukraine : le dénouement en Ukraine, ainsi que la manière et le moment où elle se produira, restent un mystère. Pourtant, la boucle de polycrise découlant de la guerre – insécurité énergétique et alimentaire, inflation, ralentissement économique – pourrait générer une « lassitude de l’Ukraine » en Occident, menaçant un soutien vital. Alors que l’hiver s’installe et que la guerre ralentit, Poutine va sans doute intensifier sa stratégie de destruction, en s’attaquant aux infrastructures énergétiques et hydriques de l’Ukraine, cherchant à faire s’effondrer l’Ukraine en tant qu’État fonctionnel avant que ses pertes ne contraignent celui-ci à accepter un certain degré de défaite.

Depuis le 24 février, Kiev s’est emparé de Kherson dans le sud et de certaines parties du Donbass dans le nord-est – plus de 50 % des terres que Moscou occupait autrefois – ce qui renforce sa position. Une résolution négociée – ou même un cessez-le-feu et un armistice durables – est encore prématurée car les deux parties pensent pouvoir gagner. Kiev a publié un plan de paix en 10 points lors de la réunion du G-20 en novembre. Ce plan exigeait que la Russie se retire de l’ensemble du territoire souverain de l’Ukraine et paie des dommages et intérêts ; en fait, il demande la reddition totale de Poutine. Des pressions antagonistes s’exercent : d’une part, Kiev demande aux États-Unis et à l’OTAN de lui envoyer davantage d’armes de pointe, y compris des armes à longue portée, comme les systèmes de missiles tactiques de l’armée et les défenses antimissiles ; d’autre part, certains membres du Congrès américain veulent réduire le soutien à l’Ukraine.

La guerre génère de multiples risques interconnectés : un conflit qui se prolonge et s’enlise ; une escalade si les États-Unis et l’OTAN envoient des armes de pointe supplémentaires à Kiev en réponse aux bombardements de Poutine ; l’utilisation d’armes nucléaires par la Russie si Kiev tente de s’emparer de la Crimée ; une « lassitude de l’Ukraine » en Europe à mesure que la récession s’installe ; et un désaccord entre les États-Unis et l’Union européenne sur la quantité et la teneur de l’assistance militaire à fournir à Kiev.
Probabilité :

2) Une insécurité alimentaire grandissante : le Programme alimentaire mondial (PAM) a mis en évidence un « anneau de feu », alerte rouge de la faim et de la malnutrition qui se répand partout dans le monde depuis l’Amérique centrale et Haïti, en passant par l’Afrique du Nord, le Sahel, le Ghana, la République centrafricaine et le Soudan du Sud, puis vers l’est dans la Corne de l’Afrique, la Syrie et le Yémen et allant jusqu’ au Pakistan et à l’Afghanistan. Le nombre de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë a bondi, passant de 135 millions à 345 millions depuis 2019. Même si la guerre en Ukraine se résout pacifiquement et que les futurs envois de céréales en provenance d’Ukraine ne sont pas en péril, les pénuries alimentaires continueront d’exister.

Outre les conflits, le changement climatique – qui provoque des sécheresses plus graves et modifie le régime des précipitations – est un facteur majeur d’insécurité alimentaire et il est peu probable qu’il soit efficacement réduit en 2023. La flambée des prix du gazole et des engrais, exacerbée par la guerre en Ukraine et les problèmes de la chaîne d’approvisionnement (acheminement des cultures vers les marchés et transformation de la viande et de la volaille), a entraîné une augmentation des coûts relatifs à l’alimentation du bétail et des vaches laitières. Les coûts de l’aide humanitaire augmentent du fait de l’inflation : Le montant supplémentaire que le PAM consacre aujourd’hui aux frais de fonctionnement aurait auparavant permis de nourrir 4 millions de personnes pendant un mois.
Probabilité :

3) Bouleversement et confrontation avec l’Iran : tout comme dans le cas de la guerre en Ukraine, le soulèvement populaire sans précédent en Iran pourrait se transformer en une polycrise. Les planètes sont déjà alignées pour un nouveau conflit dangereux entre les États-Unis et/ou Israël et Téhéran. L’accord sur le nucléaire iranien, qui était sur le point d’aboutir il y a quelques mois à peine, est maintenant en veilleuse, voire au point mort. L’Iran accélère sa production d’uranium hautement enrichi (UHE, 60 % des 90 % nécessaires à la fabrication d’une bombe) de qualité proche de celle d’une bombe et n’est plus qu’à quelques semaines d’en avoir suffisamment pour fabriquer une bombe et disposer d’une tête nucléaire capable d’être lancée dans deux ans ou moins.

La fourniture par l’Iran de drones et de missiles à la Russie ajoute une nouvelle dimension à la confrontation et incite à l’adoption de nouvelles sanctions. L’affaiblissement de la légitimité de la théocratie et la répression du soulèvement populaire sans précédent ajoutent de l’incertitude. L’Iran pourrait bien ne se trouver qu’à une grève générale près d’une révolution politique : un événement à faible probabilité mais à conséquences maximales.

Un nouveau gouvernement d’extrême droite en Israël et une Chambre républicaine des représentants aux États-Unis intensifieront les pressions en faveur d’un bombardement ou d’un sabotage de l’usine d’enrichissement de Fordow ainsi que des installations de missiles et de drones de Téhéran. En réponse, l’Iran pourrait frapper les installations pétrolières saoudiennes ou les navires pétroliers dans le golfe d’Ormuz, perturbant le trafic maritime alors que le risque d’une escalade du conflit augmente. La chute de la théocratie provoquée par les manifestations populaires est un événement à faible probabilité et à conséquences extrêmement lourdes, qui pourrait transformer la géopolitique d’un Moyen-Orient déjà en proie à de graves troubles.
Probabilité de confrontation :

4) Aggravation de la crise de la dette dans le monde en voie de développement : le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a averti que 54 pays à revenu faible ou intermédiaire ont de « graves problèmes d’endettement ». Ces pays représentent à eux seuls 18% de la population mondiale, mais plus de 50% des personnes vivant dans l’extrême pauvreté et comptent 28 des 50 pays les plus vulnérables au changement climatique. De tout temps, l’allégement de la dette est arrivé « trop faiblement et trop tard ». Au départ, les problèmes de solvabilité ont souvent été confondus avec des problèmes de liquidité, ce qui a conduit à des crises de la dette prolongées aux conséquences économiques graves.

Les pays à faible revenu, comme la Somalie et le Zimbabwe, figurent en tête de la liste des pays en détresse économique du PNUD, mais Oxford Economics estime que de nombreux pays émergents résisteront à la tempête, ayant déjà réduit leurs dépenses au début du cycle baissier. La situation budgétaire désastreuse de la plupart des pays en voie de développement est de mauvais augure pour la réalisation des objectifs de développement durable des Nations unies d’ici à 2030. Au lieu de cela, ces pays risquent fort, en 2023, de connaître plus de pauvreté, moins de progrès en ce qui concerne l’éducation et une capacité réduite à lutter contre le changement climatique.
Probabilité :

5) La spirale de la dette mondiale : Selon l’Institut international de la finance, tant l’endettement des entreprises non financières (88 000 milliards de dollars, soit environ 98 % du PIB mondial) que la dette conjointe des gouvernements, des entreprises et des ménages (290 000 milliards de dollars d’ici le troisième trimestre de 2022) ont augmenté au cours des quatre à cinq dernières années. Plusieurs années de taux d’intérêt bas – voire négatifs dans certains cas –, favorisant l’argent facile, contribuent à expliquer cette situation. Bien que le total ait légèrement diminué, la polycrise de la hausse des taux d’intérêt, de la vigueur du dollar, de la récession en Europe, de la faiblesse de l’économie chinoise et des incertitudes concernant l’Ukraine risque de déclencher une nouvelle crise financière régionale, voire mondiale.

L’ampleur de la dette est nettement supérieure à celle de la crise financière des années 2007-2008, et les difficultés des finances publiques des principaux pays de l’OCDE sont plus préoccupantes. Plus inquiétante encore est la baisse de la coopération internationale, qui est bien moins bienveillante qu’en 2008. Un Congrès républicain est moins susceptible d’approuver l’augmentation des ressources du FMI et de la Banque mondiale pourtant indispensables pour prévenir les défauts de paiement et rééchelonner la dette, en particulier dans les pays en voie de développement, mais aussi potentiellement en Italie. Le G20 a joué un rôle clé dans la crise financière de 2007-2008, mais à en juger par la réunion du G20 à Bali en novembre, les efforts de coordination pour gérer la dette sont insuffisants.

La Chine, principal créancier des pays en voie de développement, préfère gérer la dette de manière bilatérale, et ses relations tendues avec les États-Unis laissent penser que Pékin sera peu enclin à coopérer avec Washington comme en 2008. L’étincelle qui déclenchera une nouvelle crise financière majeure pourrait émaner de menaces de défaut de paiement d’un ou plusieurs pays en voie de développement ou de l’Italie, d’un effondrement d’entreprises de type Lehman Brothers ou d’une panique si la guerre en Ukraine dégénère en affrontement de niveau nucléaire.
Probabilité : crise régionale : moyenne+ ; mondiale : moyenne

6) Le creusement du déficit de la coopération mondiale : Les risques mondiaux, qui vont du changement climatique à la dette des pays les moins avancés (PMA) en passant par la question des débris spatiaux, ne cessent de croître parce que la concurrence grandissante entre les grandes puissances rend plus difficile la coopération dans le domaine des problèmes mondiaux collectifs. Après la réunion du G-20 en novembre entre le président Joe Biden et le président chinois Xi Jinping, les deux dirigeants ont convenu de reprendre les discussions bilatérales sur le changement climatique. Toutefois, un autre affrontement au sujet de Taïwan mettra probablement un terme à ces efforts. Le système commercial multilatéral est en train de sérieusement se désagréger, ainsi que la directrice générale de l’OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, en a récemment averti, alors même que les coûts du protectionnisme et des efforts d’autosuffisance des grandes puissances ralentiront la croissance économique de tous les pays.

D’autres institutions se révèlent inefficaces : le G20 a mis du temps à désamorcer les crises de la dette qui se multiplient dans les pays les plus durement touchés, comme le Bangladesh, le Pakistan, le Sri Lanka et d’autres, tandis que la Banque mondiale a été vivement critiquée par les pays en voie de développement pour ne pas avoir consacré davantage de fonds à la lutte contre le changement climatique. Si les institutions multilatérales ne prennent pas davantage de mesures pour relever les défis actuels, la légitimité de l’ordre libéral occidental de l’après-Seconde Guerre mondiale s’érodera, en particulier aux yeux de nombreux pays du Sud, qui voient aujourd’hui leurs chances de développement économique rapide s’amenuiser.

La fragmentation de l’ordre international en un ensemble de groupes régionaux et de normes concurrentes inefficaces est une autre des conséquences du nationalisme économique qui mène à un manque de coopération en matière de réformes et de mise à jour des institutions mondiales. L’effondrement du système multilatéral ne fera qu’accroître les risques d’aggravation de la pauvreté, du nationalisme et des conflits.
Probabilité :

7) Un système technopolarisé et fragmenté : le Boston Consulting Group estime que si les grandes puissances essaient de devenir totalement autosuffisantes en matière de semi-conducteurs, comme le souhaite l’administration Biden, l’investissement initial pourrait atteindre 1 000 milliards de dollars et les puces coûteraient 35 à 65 % plus cher. À mesure que la guerre technologique sino-américaine s’intensifie, la Chine ne pourra pas se procurer de nombreux produits étrangers et devra les remplacer par des articles fabriqués en Chine, ce qui compromettra les efforts entrepris pour respecter les normes mondiales. En examinant 81 technologies en cours de développement, une étude du McKinsey Global Institute a révélé que la Chine a jusqu’à présent respecté les normes mondiales pour plus de 90 % d’entre elles. Dans bon nombre de ces cas, Pékin s’est appuyé sur des multinationales étrangères pour obtenir 20 à 40 % des intrants nécessaires.

Étant donné que les semi-conducteurs jouent un rôle de plus en plus important dans la fabrication des biens de consommation, et pas seulement dans l’électronique ou les équipements technologiques haut de gamme, les marchés de tous les biens manufacturés risquent de se fragmenter, ce qui entraînera une augmentation des coûts (ce qui veut dire inflation) et une restriction des choix pour les consommateurs. À plus long terme, si l’économie mondiale devait se scinder en deux blocs autonomes, l’Occident et la Chine, le PIB mondial diminuerait d’au moins 5 %, ce qui serait un scénario bien pire que celui relevant des dommages causés par la crise financière de 2007-2008, selon l’OMC. Les modèles du FMI montrent que « dans cette hypothèse, les perspectives de croissance des économies en voie de développement seraient plus sombres, avec pour certaine des pertes de bien-être pouvant atteindre un taux à deux chiffres ».
Probabilité :

8) Aggravation des impacts du changement climatique : la COP27 s’est terminée sur un sentiment de frustration plutôt que sur une impression de réussite. Les appels à la sortie progressive des combustibles fossiles ont été mis en échec par les États producteurs de pétrole, alors même que la limitation de l’augmentation de la température à 1,5 °C restait l’objectif à atteindre. La plupart des scientifiques estiment que la planète atteindra très bientôt ce niveau d’augmentation de 1,5 degré Celsius et que nous sommes tout à fait sur voie d’une augmentation de 2,2 degrés Celsius à moins que les pays ne s’engagent à réduire leurs émissions totales de gaz à effet de serre de 43%. Un climat plus chaud signifie des sécheresses et des inondations plus longues, ainsi que des changements dangereux dans les modèles de précipitations ce qui va perturber les rendements agricoles.

Le seul point quelque peu lumineux de la COP27 a été l’accord sur un nouveau fonds « pertes et dommages » destiné à aider les pays en voie de développement à couvrir les coûts des impacts du changement climatique. Pour autant, aucune décision n’a été prise quant au montant du financement que le monde industrialisé s’engage à verser. Les pays occidentaux qui étaient déjà tenus de fournir une aide financière aux pays en voie de développement pour leur transition vers un monde plus sobre en carbone n’ont jamais tenu leurs promesses.

Les Républicains, qui contrôlent désormais la Chambre des Représentants, ont déjà déclaré qu’ils ne voulaient pas rémunérer les autres pour lutter contre le changement climatique. Le virage à droite, plus nationaliste, de la politique européenne pourrait également mettre en péril le financement des « pertes et dommages » dans les années à venir. En dépit de la fréquence croissante des phénomènes météorologiques extrêmes – qui touchent tous les pays, et pas seulement les pays pauvres – le changement climatique n’est pas encore devenu une priorité absolue pour l’Occident industrialisé.
Probabilité :

9) L’aggravation des tensions entre les États-Unis et la Chine : bien que le sommet Biden-Xi de novembre ait permis aux deux dirigeants de lancer un processus de normalisation des relations, des divergences fondamentales subsistent, elles concernent Taïwan, les règles et normes technologiques, le commerce, les droits humains et l’agression de Pékin fondée sur des revendications territoriales discutables dans les mers de Chine méridionale et orientale. Une première reprise des dialogues sur le commerce, le climat et les relations entre armées a été amorcée, mais le nationalisme explosif des deux parties pourrait compromettre tout progrès substantiel. Jusqu’à présent, la réponse de Pékin concernant l’interdiction d’exporter des puces d’intelligence artificielle et des superordinateurs, ainsi que des équipements de fabrication de puces, mesure qui a été décrétée par l’administration Biden, a été de déposer une plainte auprès de l’OMC et de prévoir d’investir 143 milliards de dollars supplémentaires en subventions en faveur de son industrie de semi-conducteurs.

Les mesures prises par Biden ont pour objectif d’étouffer tout développement de la Chine dans le domaine des technologies de pointe. Bien que l’antipathie à l’encontre de la Chine soit partagée par les deux partis, la nouvelle Chambre contrôlée par le GOP prévoit d’entreprendre un programme encore plus agressif de dénigrement à l’égard de la Chine en ce qui concerne Taïwan, le commerce et les droits humains, ce qui risque fort de saper les efforts de Biden. Bien que nous jugions extrêmement faible la probabilité que la Chine tente de contraindre Taïwan à l’unification en 2023 ou dans les quelques années qui suivent, la loi américaine sur la politique de Taïwan, qui vise à renforcer les liens militaires et politiques avec ce pays, relancerait les manoeuvres de style un prêté pour un rendu en matière de détermination et diabolisation réciproques.

Les efforts déployés pour stabiliser les relations se heurtent à de sérieux obstacles et risquent fort de capoter.
Probabilité :

10) Une conjoncture plus périlleuse pour la péninsule coréenne : les tests continus de Pyongyang portant sur une gamme complète de missiles, qu’ils soient balistiques (86 essais en 2022), de croisière, tactiques mobiles de moyenne portée à capacité nucléaire et balistiques intercontinentaux font partie du programme de la Corée du Nord visant à créer un arsenal de deuxième frappe permettant de résister et d’offrir davantage de moyens de coercition et d’attaque. Les préparatifs en vue d’un septième essai nucléaire sont terminés depuis des mois, comme l’ont signalé les gouvernements américain et sud-coréen.

L’existence d’un potentiel accord de soutien à la retenue entre Pyongyang et Pékin peut expliquer pourquoi l’essai n’a pas eu lieu. Néanmoins, si un septième essai a lieu et que Pékin oppose son veto aux sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies visant à punir la Corée du Nord, le fossé entre les États-Unis et la Chine se creusera vraisemblablement. L’arsenal de Pyongyang est déjà bien plus important que nécessaire quand on pense à une dissuasion réciproque vis à vis des États-Unis et de la République de Corée du Sud. Le président Kim Jung Un pourrait être tenté de mener des actions de provocation en raison d’une mauvaise estimation de la situation et cela pourrait bien provoquer une crise et/ou un affrontement entre le Nord et le Sud.
Probabilité :

Des risques inconnus – inconnus
Les risques évoqués ci-dessus sont, selon l’expression de l’ancien secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, des « inconnus connus » – des développements ou des tendances discernables dont les possibles trajectoires peuvent être estimées. Il existe en outre tout un ensemble d’ « inconnues inconnues », c’est-à-dire des événements que nous ne pouvons pas anticiper et qui auraient des conséquences catastrophiques. Parmi ceux-ci citons : l’éruption d’un supervolcan (Yellowstone, Indonésie, Japon) ; un astéroïde géant de près de 10 kilomètres de large, une magnitude qui a tué les dinosaures il y a 66 millions d’années ; une tempête solaire – injection de masse coronale – projetant sur la Terre de grandes quantités de particules chargées magnétiquement qui pourraient désactiver les réseaux pendant des semaines ou des mois ; et des sursauts de rayons gamma radioactifs provenant de l’espace lointain. Comme nous l’avons vu avec la pandémie COVID-19, des milliers de virus sur notre planète pourraient déclencher de futures pandémies, certaines plus difficiles à contrer que la COVID.

Ces catastrophes ont toutes un faible taux de probabilité mais un impact très élevé.

Mathew Burrows et Robert Manning sont des chercheurs émérites du programme Reimagining U.S. Grand Strategy du Stimson Center.

Image : Reuters.

Source : The National Interest, Mathew Burrows et Robert A. Manning, 19-12-2022

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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