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Insuffisance cardiaque : Comment la prévenir et comment la traiter (grâce à de nouvelles molécules)

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CŒUR – Découvrez, chaque jour, une analyse de notre partenaire The Conversation. Aujourd’hui, trois médecins nous expliquent pourquoi les défaillances cardiaques ne sont pas une fatalité

Sans hésitation possible, l’insuffisance cardiaque (IC) est une des principales préoccupations en santé publique en France. Cette pathologie est, dans notre pays, à l’origine de plus de 200 morts en moyenne par jour ( chiffres 2016), soit plus que le nombre de personnes décédées du fait de l’ épidémie de Covid-19 (176 morts par jour en moyenne d’après les chiffres du Vidal) mais elle n’est pas une fatalité.

En effet, nous savons mieux comment agir pour diminuer le risque d’apparition ou d’aggravation de ses symptômes. Cet article a un double rôle : d’une part, expliquer ce qu’est l’IC, son origine et ses symptômes. Et d’autre part rappeler que, même si la prise en charge médicamenteuse s’améliore toujours, il n’y aura régression du nombre de patients concernés que par la prise de conscience de la nécessité de changer les habitudes hygiéno-diététiques. Soit être plus actif et adopter de nouvelles habitudes alimentaires.

De quoi parle-t-on vraiment ?

L’insuffisance cardiaque (IC) se définit comme l’incapacité du muscle cardiaque à assurer normalement son rôle de propulsion du sang dans l’organisme. Elle est liée à une anomalie fonctionnelle et/ou structurelle du cœur.

Les symptômes habituellement observés sont une difficulté respiratoire, une augmentation de volume des membres inférieurs et une fatigue, le tout étant lié à une rétention anormale d’eau et de sel et/ou une inadéquation des apports hydriques comparativement aux besoins des autres organes (muscles, cerveau, rein, tube digestif…). Le diagnostic est porté à la suite de la présence de ces symptômes et à la constatation d’anomalies à l’échographie cardiaque.

On distingue trois grands groupes d’IC selon la « fraction d’éjection », soit le pourcentage de sang que le cœur peut évacuer à chaque battement, mesurée à l’échographie : lorsque le pourcentage est inférieur à 40 %, lorsqu’il se situe entre 40 % et 50 % et lorsqu’il est supérieur à 50 %. Les valeurs normales de fraction d’éjection sont supérieures à 50 %.

Dans les pays développés, les principales causes d’IC sont les pathologies des artères du cœur (appelées coronaires) et l’hypertension artérielle. Toutes deux, ainsi que l’intensité des symptômes lorsque l’IC se déclare, peuvent être prévenues par des mesures hygiéno-diététiques adaptées. Les principaux facteurs de risque sur lesquels il est possible de jouer sont l’hypertension artérielle, le tabagisme, l’excès de « mauvais » cholestérol, le diabète, la sédentarité ainsi qu’une surcharge pondérale.

En France, cette maladie est encore porteuse d’une morbidité (nombre de malades ou de cas dans une population et à un moment donné) et d’une mortalité importantes. Sur la base des causes déclarées de décès au CépiDc (Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès) à la dernière date disponible (2016), le nombre imputable à l’IC est de 78.033 pour 12 mois. D’après les données de Santé publique France, 2,3 % de la population française serait touchée et ce chiffre monte jusqu’à 10 % au-delà de 70 ans.
Comment prévenir l’insuffisance cardiaque
La stratégie nationale de santé (SNS) 2018-2022 et le Plan national de santé publique « Priorité prévention » affirment la priorité de la prévention. Une activité physique régulière et d’intensité modérée (équivalent marche sur terrain plat à 5 km/h ou cyclisme sur terrain plat à 15 km/h) à hauteur de 30 minutes par jour est recommandée par l’ Organisation mondiale de la santé (OMS) et permet de prévenir efficacement le développement d’une hypertension artérielle, un diabète, une dyslipidémie et une surcharge pondérale.

Concernant l’alimentation, il est recommandé de suivre un régime de type méditerranéen privilégiant :

Les acides gras insaturés (huile d’olive, huile de colza et noix notamment),
Un apport minimum de cinq fruits et légumes par jour,
Des apports réguliers (les jours d’activités), mais pas systématique, en céréales de préférence complètes et biologiques (pain, blé, boulgour, seigle…),
Des apports modérés en viande, de préférence blanche (trois fois par semaine) et poisson (au moins une fois par semaine),
Des apports limités en sel (moins de 5 grammes par jour),
Des apports faibles en sucres ajoutés (soda, jus de fruits, desserts industriels, etc.), avec moins de 25 grammes de sucre ajouté par jour,
Une consommation modérée d’alcool, et seulement au cours du repas (un verre par jour, 5 jours sur 7).

Une étude récente du New England Journal of Medicine objective une baisse de la mortalité cardiovasculaire de 30 % chez des sujets en bonne santé ayant suivi un régime méditerranéen.

Tous ces éléments sont repris sur le site de l’OMS. Par ailleurs, le 13ᵉ programme général de travail de l’OMS (2019-2023) a pour mesures prioritaires la réduction des apports en sel/sodium et l’élimination des acides gras trans saturés industriels.

Avant de passer à un traitement pharmaceutique, adapter ses habitudes a un effet préventif important © J. Zoll, A. Charlot & F. Sauer (via The Conversation)
L’intérêt d’une vigilance médicale simple
Un suivi médical régulier et personnalisé est recommandé afin d’évaluer l’état de santé générale et de dépister les facteurs de risques cardiovasculaires, qui sont le plus souvent silencieux à la phase initiale. Une visite chez un cardiologue est recommandée à partir de l’âge de 40 ans, notamment en cas de reprise d’une activité sportive.

Une pression artérielle inférieure à 140 mmHg (pression artérielle systolique) sur 90 mmHg (pression artérielle diastolique) est préférable, afin de limiter les contraintes opposées au cœur pour l’expulsion du sang dans l’organisme. Une prise régulière de la pression artérielle au bras et au repos permet le dépistage précoce de cette pathologie. De même, une surveillance du taux de sucre dans le sang (glycémie) peut s’avérer nécessaire, l’ hyperglycémie chronique pouvant être à l’origine d’un déséquilibre énergétique du cœur.

L’arrêt du tabagisme est une des actions les plus efficaces dans la prévention cardiovasculaire comme des pathologies pulmonaires.

Un contrôle du cholestérol est également plébiscité, en distinguant taux de « mauvais » cholestérol (LDL-c) et de « bon » cholestérol (HDL-c). Le premier, capable de s’infiltrer dans les parois des artères, peut y générer la création de plaques de lipides et une inflammation en surface. Ce processus, nommé athérosclérose, entraîne un rétrécissement de la lumière des artères qui peut être à l’origine d’un infarctus du myocarde (le cœur ne reçoit plus assez de sang).

L’ensemble des mesures citées ci-dessus est recommandé pour la baisse du LDL-cholestérol. Il n’y a, à ce jour, pas de traitement médicamenteux permettant de prévenir efficacement la formation d’athérosclérose.

Pour l’hypertension artérielle, l’hyperglycémie ou le taux de LDL-c, si trois mois de mesures hygiéno-diététiques bien suivis (activité physique et alimentation) ne permettent pas un retour à la normale des valeurs biologiques, un traitement pharmacologique pourra être envisagé. Avec bien sûr le maintient des mesures hygiéno-diététiques.
Quels sont les traitements possibles ?
Le traitement de l’IC repose sur le respect de mesures hygiéno-diététiques et la mise en place d’un traitement médicamenteux. Le large arsenal thérapeutique permet de limiter les symptômes au quotidien et de réduire la mortalité.

Ces traitements ont pour fonctions de soulager les contraintes imposées au cœur (fréquence cardiaque élevée, pression artérielle importante, évacuation de l’excès d’eau et de sel dans l’organisme) et, dans certains cas, de traiter le facteur déclenchant. On y compte :

Les bêtabloquants (pour réguler le rythme cardiaque),
Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (angiotensine II), associés ou non à un inhibiteur de la néprilysine (contre l’hypertension),
Les antagonistes des minéralocorticoïdes et autres diurétiques (en cas d’excès d’eau et de sel),
Et un dernier venu très prometteur : les glifozines (antidiabétiques oraux).

Ils peuvent être prescrits lorsque la fraction d’éjection du sang hors du cœur est inférieure à 40 %, pas systématiquement dans le cas contraire.

Dans des cas d’IC sévère et/ou évoluée, des médicaments pour suppléer la fonction contractile peuvent être envisagés, voire la mise en place d’une assistance mécanique cardiaque temporaire ou définitive, ainsi qu’une greffe cardiaque.
Un nouveau médicament dans l’arsenal : les glifozines
La Société européenne de cardiologie (ESC) a mis en avant ces antidiabétiques oraux en août 2021. En effet, deux études, DAPA-HF et EMPEROR-REDUCED, réalisées sur 8.474 patients, ont comparé l’efficacité des glifozines en sus d’un traitement classique : elles ont constaté une baisse de la mortalité cardiovasculaire de 14 % comparativement au traitement classique. Il est également noté une baisse de 25 % du critère combiné de première hospitalisation.

Les molécules utilisées sont notamment la dapaglifozine et l’empaglifozine, des inhibiteurs du transporteur de glucose (SGLT2) dans les reins. Le rôle de ce transporteur est de réabsorber 90 % du glucose extrait par ces derniers. Raison de son indication dans le diabète (pour augmenter l’évacuation de glucose par les urines, et donc baisser la glycémie).

Ces molécules sont la première classe d’antidiabétiques oraux capables d’améliorer le contrôle glycémique tout en favorisant une perte de poids. Des études ont récemment démontré un bénéfice net sur les morbidité et mortalité en cas d’IC, même en l’absence de diabète préexistant. Même si les raisons n’en sont pas encore clairement établies, il semble que leur amélioration de la « force » du cœur joue un rôle important. Il se pourrait qu’un meilleur maintien de la glycémie et une perte de poids participent également à ces effets bénéfiques.
Un enjeu de santé publique majeur
L’IC, et plus largement les maladies cardiovasculaires, reste un problème de santé publique majeur. Plusieurs plans qui incluent des recommandations hygiéno-diététiques (sport et alimentation) ont été mis en place par les pouvoirs publics afin d’améliorer la prévention. Malheureusement, elles restent insuffisamment appliquées… La faute notamment à notre mode de vie et à des habitudes difficiles à modifier.

20 Minutes avec The Conversation

 

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