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Législatives en Irak: indifférence et désillusion à la veille du scrutin

Meguetan Infos

En Irak, 25 millions d’électeurs sont appelés à se rendre aux urnes, dimanche 10 octobre, pour de nouvelles élections législatives anticipées. Deux ans après le soulèvement populaire qui avait secoué le pays, la population ne croit plus vraiment au changement.

« Boycott ! » À la veille des élections législatives, ce mot est prononcé par de nombreux Irakiens, principalement des manifestants anti-pouvoir de 2019. À l’époque, ils avaient demandé un renouvellement de la classe politique par les urnes, mais aujourd’hui, peu d’entre eux semblent enclins à aller voter.

Et ce pour plusieurs raisons, explique notre correspondante à Bagdad, Lucile Wassermann : d’abord, beaucoup pensent que le scrutin sera entaché de fraudes, comme cela a été le cas en 2018, d’autres critiquent le contexte électoral, car de nombreux militants et candidats indépendants ont été menacés, voire visés par des hommes armés ces derniers mois. La faute aux milices, disent ces Irakiens, qui minent tout effort de démocratie dans le pays.

Ces critiques font donc craindre un taux d’abstention particulièrement élevé ce dimanche, malgré les efforts répétés du gouvernement, d’Ali al-Sistani, la plus haute autorité religieuse chiite du pays, ou encore de l’ONU pour encourager la population à aller voter. Les Irakiens leur répondent qu’il faudra bien plus que des discours et une élection pour rebâtir leur confiance en un système qui n’a fait que les décevoir pendant plus de 15 ans.
Ali Aqil, candidat indépendant, espère un changement malgré tout
L’élection des 329 députés se fera selon une nouvelle loi électorale, qui instaure un scrutin uninominal et augmente le nombre de circonscriptions, pour encourager indépendants et candidats de proximité. Mais les militants se réclamant du soulèvement ne participeront que peu au scrutin. Des dizaines d’entre eux ont été victimes d’enlèvements, d’assassinats ou de tentatives d’assassinat, imputés à des groupes armés pro-Iran.

Ali Aqil, un universitaire d’une quarantaine d’années, que nos envoyés spéciaux Murielle Paradon et Boris Vichith ont rencontré, lui veut croire que les choses peuvent changer dans son pays. Il a décidé de se présenter aux législatives en tant que candidat indépendant pour que les protestations de 2019 n’aient pas servi à rien. « Durant le mouvement de protestations, 800 personnes ont été tuées, plus de 25 000 ont été blessées, rappelle-t-il. Je pense qu’un des objectifs de notre mouvement était de faire changer les choses. »

Le candidat veut fournir du travail aux jeunes, lutter contre la corruption, et répondre aux demandes des jeunes, dit-il. Et il appelle à aller voter. « Les Irakiens doivent réaliser qu’une large participation fera la différence, ajoute-t-il. Il est possible de chasser quelques unes des personnalités corrompues. Peut-être que le changement ne se fera pas entièrement comme nous l’espérons mais ce serait un premier pas dans la bonne direction. »
Le courant sadriste, donné grand favori
Le mouvement sadriste, dirigé par le leader chiite Moqtada Sadr, pourrait renforcer son assise au Parlement. Ses partisans se sont rassemblés ce vendredi à Bagdad.

« Oui aux réformes, non à la corruption », crient les manifestants brandissant des portrait de leur héros sur la place Tahrir, sécurisée par les forces de l’ordre. « Nous sommes des sadristes, on va gagner 100 sièges au Parlement, pour former un nouveau gouvernement et prendre le siège de Premier ministre, lance l’un d’eux. Nous serons le bloc le plus large au Parlement et on pourra faire des reformes en Irak. »

Le leader du mouvement Moqtada Sadr a toutes les chances de rafler un maximum de voix au Parlement. Il a pourtant hésité à se représenter. Connu pour être volatile et  imprévisible, mais peu importe, ses partisans le disent : ils ont une confiance aveugle en lui.

Pour les manifestants, le leader religieux est aussi un nationaliste. Il a lutté contre les Américains et il combat les influences extérieures. « Concernant Les interférences extérieures des pays voisins, Sadr ne restera pas silencieux. Nous voulons un Irak uni », affirme un manifestant.

Mais c’est sans compter les grands rivaux pro-Iran du Hachd al-Chaabi qui veulent préserver leurs acquis, après avoir fait leur entrée au Parlement pour la première fois en 2018, surfant sur la victoire contre les jihadistes du groupe État islamique (EI). Et chez les sunnites, l’influent et jeune président du Parlement, Mohamed al-Halboussi, cherche à consolider son assise populaire après une ascension fulgurante.

RFI

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