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Footballeurs binationaux d’Afrique: Quand le sportif prime sur l’affectif. Mais pas que !

La récente consécration de l’équipe de France de football comme championne du monde, avec un important contingent de joueurs d’origine africaine en son sein, relance le débat du choix de la nationalité sportive par les joueurs. Les fédérations africaines de football assistent assez souvent impuissantes à l’enrôlement par les fédérations européennes, de la France surtout, de joueurs qu’elles auraient pu recruter pour les sélections nationales locales. Quelle stratégie faut-il adopter au niveau africain afin d’être le plus performant possible sportivement parlant ?

Il s’agit là d’un débat passionnant au sein de la planète foot. Mais justement, ne faut-il pas le dépassionné ? Car, l’on a tendance en Afrique de jeter trop vite l’opprobre sur les fils du continent, qu’ils soient d’origine ou possédant la double nationalité, qui ont fait le choix d’une sélection étrangère européenne. Posons donc la balle à terre. Pour comprendre assez aisément le choix de ces sportifs, l’on peut le classer en deux catégories. D’un côté, le choix du cœur et de l’autre, le choix de la raison ou, en d’autre terme, sportif. Mais, cette catégorisation est loin d’être aussi simple.

Ainsi, lorsqu’un joueur tel fait le choix de son pays d’origine, l’on en déduit qu’il a fait un choix du cœur. Aussi, lorsque ce même joueur fait le choix de la sélection européenne, l’on pense qu’il a fait un choix de raison. Pourquoi un tel raisonnement ? Parce que, dans le premier cas, en faisant le choix d’une sélection africaine, il prendrait le risque de freiner quelque peu son ascension professionnelle et minimiser plus ou moins ses chances de jouer au plus haut niveau.

Cela du fait que les sélections africaines sont moins nantis que celles européennes et que, leur manque de professionnalisme constitue un frein considérable aux ambitions sportives d’un jouer donné. Par contre, dans le deuxième cas, le joueur d’origine africaine choisira, par exemple la France, car constituant un formidable coup de pouce professionnel. La France est un grand pays de football et, surtout, constitue un cadre idéal pour tout jeune footballeur ayant l’ambition de tutoyer les sommets du football mondial. Dans le même ordre idées, lorsque la nationalité sportive d’un joueur est, à titre d’exemple française, cela est une valeur ajoutée inestimable dans beaucoup de cas. Et lorsque cette même nationalité est malienne ou guinéenne, il va sans dire que ce n’est le même cas.

Cependant, cette thèse du choix de la nationalité sportive selon la raison ou l’affectif peut connaitre un bémol. En effet, il est assez logique pour un joueur de foot de faire le choix de la nationalité de son pays natal et où il a passé la plus grande partie de sa vie. Difficile dans ce cas d’accuser un tel joueur de mensonge lorsqu’il affirme de faire le choix d’une sélection européenne car il se sent profondément citoyen de ce pays.

Paul Pogba, international français d’origine guinéenne a toujours crié son amour pour la France et pour le maillot des bleus. Avant d’être champion du monde l’été dernier en Russie, il le fut dans la catégorie des moins de 20 ans avec la France. Par contre, rappelons qu’un de ses frères joue avec le Syli national de Guinée. Une chose est sûre, la France comme toute autre sélection européenne, ne s’intéresse qu’aux plus prometteur des binationaux. Dans le cas de Pogba, le sportif et l’affectif semble se retrouver.

Néanmoins, un autre point est à prendre en compte. Il s’agit du coté social. Rappelons que les joueurs d’origine subsaharienne et maghrébine sont tous issus des quartiers difficiles (banlieues) où la vie est assez difficile. Très souvent, ils sont victimes de délit de faciès. Chez eux se développent parfois un sentiment anti-français car s’estimant considérés comme des citoyens de seconde zone.

Là, il y a de quoi s’interroger sur le choix de beaucoup d’entre eux, lorsqu’ils optent pour la sélection française. Aujourd’hui encore, certaines mauvaises langues en France ne cessent de rappeler cette boutade de l’attaquant Karim Benzema. Celui-ci, il y a de cela plusieurs années, avait qualifié son choix de l’équipe de France de choix sportif. Des joueurs issus de la diaspora maghrébine ont souvent eu des problèmes avec la sélection, tels que Nasri ou Hatem Ben Arfa. Seuls les joueurs connaissent la motivation réelle de leur nationalité sportive. Ils sont libres de leurs choix, et les autres ne peuvent que le respecter.

Le Mali, mauvais élève en la matière
Il est évident que si l’on procédait à un classement sur la capacité des pays africains à attirer les footballeurs binationaux sous leurs couleurs, que le Mali occuperait le bas du classement. Le pays a perdu des joueurs et non des moindres, qui auraient été d’un grand apport à la sélection nationale : Alou Diarra, Lassana Diarra, Djibril Sidibé, Moussa Sissoko, Ngolo Kanté, Moussa Dembélé (le belge), la liste est loin d’être close puisque Alhassane Pleah qui semblait se rapprochait des Aigles du Mali, fut appelé, contre toute attente, par le sélectionneur des bleus lors de la dernière pause internationale.

Pourquoi un tel faible ratio pour le Mali ? Il faut avouer que sur le plan de la professionnalisation du football de sélection, le Mali a du chemin à faire. Et quand vous êtes un jeune joueur talentueux et que l’avenir semble vous tendre les bras, la dernière chose que vous voulez c’est de vous embourber dans un mélange nocif composé d’amateurisme et surtout de manque de volonté professionnelle. L’équation est toute simple. Plus les fédérations africaines mettront du sérieux dans leur travail, plus les binationaux, surtout les plus prometteurs d’entre eux, seront enclins à venir jouer sur le continent.

Cependant, il ne faut absolument pas faire une fixation sur les fils du continent qui sont en France ou ailleurs pour rendre nos sélections performantes. Bien au contraire, l’essentiel du travail doit se faire sur le plan local. Quant aux binationaux qui viendront compléter les rangs, ils ne seront que du bonus. Voilà une bonne manière pour faire le poids face à l’ogre français, belge ou encore allemand.

Mais, cette histoire est loin d’être close. Surtout lorsqu’on soupçonne les africains de faire recours à la chimie noire pour écarter un concurrent étranger beaucoup trop bon !

Ahmed M. Thiam

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